Le Contre-courant
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Chronique aventure
Descendre pour mieux remonter

Un récit d’Anik Chagnon

Originaire de Contrecœur, Anik Chagnon y a vécu jusqu’en 1990. Désormais formatrice pour le Service correctionnel du Canada dans la région de Québec, madame Chagnon voue une véritable passion pour les montagnes et de toutes les formes d’activité physique. Depuis 2001, elle parcourt la planète à la recherche de nouvelles montagnes à grimper. LeContrecourant.com a invité Mme Chagnon à partager avec nous ses aventures.

Le début du sentier

Lors d’une expédition en montagne, la descente est souvent le moment de l’introspection, là où l’heure est au bilan, au questionnement, à l’analyse. Le moment où je me demande pourquoi je monte des montagnes; pourquoi je me lance de tels défis ? Plusieurs fois au cours de mes ascensions j’ai eu mal, j’ai eu peur, j’me suis demandée ce que je faisais là. Et malgré tout, j’y retourne. Qu’est-ce qui me pousse? Qu’est-ce qui me motive? Qu’est-ce que je cherche dans la montagne? Qu’est-ce que je crois trouver au sommet?

Pour comprendre mes motivations, il faut probablement retourner brièvement à mon adolescence. Cette période qui, comme plusieurs, n’a pas été de tout repos… (surtout pour mon père). La tourmente, le tourbillon d’émotions, mon incapacité à gérer les nombreux changements de ma vie lors de cette période, m’ont fait me tourner vers des substances qui altèrent le comportement pour faire face à ces moments. J’ai trouvé dans les paradis artificiels un réconfort, l’illusion du bien-être et un faux sentiment d’appartenance. Cette période s’est prolongée au-delà de mon adolescence. Toutefois, à l’âge de 22 ans, le 22 janvier 1992 pour être plus précise, j’ai décidé que c’en était assez!

Ce fameux jour de janvier, je faisais mon premier pas vers le sommet de ma montagne intérieure. À partir de ce jour, j’ai exclu toutes les substances qui modifient la pensée et la personnalité, incluant l’alcool. Ce périple vers l’abstinence et la sobriété est un travail de longue haleine qui ne s’est pas fait tout seul. J’ai eu beaucoup de support et d’aide de la part de ma famille et mes amis.

Mais, là n’est pas le but de cette chronique. Mon intention avec ce préambule est d’abord de lier ce billet à celui du mois de mars (voir la parution du 21 mars 2017 – PLUS HAUT: l’ascension du mont Aconcagua). Le 22 janvier 1992, je faisais mon premier pas sur la montagne de ma vie et 25 ans plus tard, presque jour pour jour, le 23 janvier 2017, j’atteignais le sommet de l’Aconcagua (6962 mètres).

La promesse

On dit souvent qu’il n’y a pas de hasard. Je le crois. Lorsque je me suis inscrite pour cette expédition à l’Aconcagua, je n’avais aucunement fais le lien avec cette date importante. En effet, je savais que l’agence proposait le voyage du 7 au 30 janvier 2017 mais ce n’est qu’après avoir analysé l’itinéraire d’un peu plus près, que j’ai réalisé qu’il y avait une possibilité d’atteindre le sommet autour du 22 janvier. Cette journée d’ascension finale sur l’Aconcagua revêtait alors un cachet particulier en raison de la symbolique associée à cette date. Tout au long de cette journée en montagne, je ne cessais de me répéter qu’avec tous les obstacles que j’avais traversés dans ma vie, je ne pouvais pas abandonner, je n’avais qu’à mettre un pied devant l’autre sans m’arrêter. Comme pour mon rétablissement qui se fait un jour à la fois, l’Aconcagua se fait un pas à la fois.

Je m’étais fait une promesse intérieure; tant que la météo et la santé seraient de mon côté, je ne m’arrêterais pas. Je ne voulais absolument pas abandonner avant d’avoir atteint le sommet. Mais je devais aussi trouver le juste équilibre entre «laisser mon moral me miner et me décourager» et «réduire au silence les signes avant-coureurs d’un problème de santé en raison de l’altitude». La ligne est mince quand on se retrouve sur le faîte d’une clôture et on peut facilement basculer du mauvais côté.

Le sceau

Au moment où j’ai atteint ce sommet, j’ai eu l’impression que cet accomplissement était le résultat non pas de mes trois semaines sur la montagne et de mes six mois d’entrainement préparatoire, mais davantage un des résultats de mes 25 années de cheminement personnel et spirituel. Ce n’est pas ma première montagne ni ma dernière; par contre, je reste convaincue que l’atteinte de ce sommet identifie un tournant. Comme une espèce de marque-place, un sceau d’authenticité. Le «hasard» fait bien les choses et a marqué le temps pour moi. Ce sont donc ces pensées qui m’accompagnent lorsque je redescends la montagne ce jour-là.

La descente

Nous sommes restés environ 45 minutes au sommet. Après avoir célébré, pleuré de joie et prit quelques photos, nous avons amorcé la descente. La majorité des accidents en montagne se produisent à la descente. La fatigue, la négligence et la nonchalance des grimpeurs est souvent responsable des chutes. Le défi est alors plus technique. La montée abrupte devient alors la descente pentue avec ses rochers acérés qui menacent de nous arracher un morceau de peau ou de nous briser une articulation à chaque fois que l’on trébuche nonchalamment. Sans compter la possibilité qu’un autre grimpeur fasse décrocher une pierre au dessus de notre tête ou que nous-même ne trébuchions et ne se fracassions le crâne sur la paroi.

L’arrivée au camp

Nous revenons à notre point de départ du matin, le camp Colera, vers 20h00 le soir du 23 janvier. Au total, pour cette seule journée, nous aurons marché 15 heures, à plus de 6000 mètres d’altitude. L’envie après une telle journée est de s’engouffrer dans sa tente et de s’affaler dans son sac de couchage sans prendre soin de soi. Il faut lutter contre cette envie afin de boire et manger pour éviter la déshydratation et l’oedème. Il ne faut pas que j’oublie que je me trouve toujours à 6000 mètres d’altitude et que je ne suis qu’à la moitié du chemin. Une ascension n’est complétée qu’une fois revenu au pied de la montagne. Or, nous sommes encore très haut.

Les derniers pas

Deux jours supplémentaires seront nécessaires pour terminer cette expédition. Le lendemain du sommet, nous descendons au camp de base en une seule journée; ce que nous avons mis plus d’une semaine à faire en montée se descend en quelques heures seulement. À ce moment, comme nous descendons, nous avons beaucoup plus d’énergie en raison de l’altitude qui diminue et ainsi l’oxygène qui se fait plus présent. De plus, l’effort musculaire est moins grand. Arrivés au camp de base, nous apprenons qu’il est possible de dormir dans une des tentes cuisines que l’agence mets à notre disposition pour les repas. D’un commun accord, toute l’équipe convient de ne pas monter les tentes ce soir là et de dormir tout le monde ensemble pour notre dernière nuit sur la montagne.

Au lendemain, c’est le départ ultime de l’Aconcagua. Une longue journée nous attend. 27 km de sentiers en descente, de poussière, de pierres, de petites rivières à traverser; tout ça sous un chaud soleil à des températures environnants les 30º Celsius. Cette journée est pour plusieurs synonyme de retour sur soi, de réflexions. Les grimpeurs sont alors dispersés sur le sentier et personne ne parle vraiment. Tout le monde est dans sa «bulle» et il y a peu d’échanges entre les membres. Vu du haut des airs, notre équipe a probablement l’aspect d’un long chapelet qui s’égrène le long du sentier. Cette réflexion est nécessaire et bénéfique, question de faire le bilan.

Au final, en 15 jours, nous aurons accompli un tour complet du massif; c’est ce qu’on appelle le sentier 360 degrés sur l’Aconcagua. En fait, nous avons fait l’ascension à travers la Vallée de Vacas et sommes descendus par la Voie Normale. Ce programme offre une vue complète de la plus haute montagne des Amériques, permettant ainsi d’apprécier l’ampleur et la splendeur de ce géant de pierres.

Les prochains pas

L’Aconcagua ne fut pas ma première montée. J’ai d’abord débuté il y a une quinzaine d’années avec les montagnes environnantes; le mont Orford, l’Acropole des Draveurs dans Charlevoix, le mont du Lac des Cygnes, les montagnes de la chaîne présidentielle dans le New Hampshire, etc.

En 2007, j’ai participé à une ascension caritative du mont Kilimandjaro, en Tanzanie. Ce voyage fut le début d’une grande passion et d’une série d’expériences en montagne toutes plus enrichissantes les unes que les autres. Dans les prochaines chroniques, je vous entretiendrai sur cette ascension du Kili, et également le mont Blanc en France, l’Elbrous en Russie, ainsi que d’autres accomplissements.

Si vous avez des questions ou des commentaires sur cette chronique ou sur mes ascensions vous pouvez me contacter via redaction@lecontrecourant.com . Il me fera plaisir de communiquer ensuite avec vous.

Anik Chagnon, Mai 2017

Des racines bien ancrées dans la région

Malgré mon éloignement de Contrecœur, mes racines s’y trouvent. Mes parents et ma sœur y vivent toujours et je me fais un plaisir de vous présenter le commerce de ma sœur Guylaine, qui est aussi un de mes commanditaires :

Salon Brune et Blonde Coiffure
936 St-Antoine, Contrecœur
450-561-8575 / 514-605-0719

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