COVID-19
Le gouvernement doit respecter les droits humains et revenir sur sa décision d’imposer la vaccination obligatoire, notamment chez les groupes communautaires

Communiqué – Si l’on en croit son communiqué de presse du 7 septembre le gouvernement appliquera, dans moins d’un mois, une mesure imprécise et qui est loin de faire l’unanimité, soit la vaccination obligatoire dans plusieurs milieux de travail. En plus de l’imposer au personnel de ses propres établissements et ressources, de même que pour les personnes proches aidantes qui y accèdent, le gouvernement annonçait du même souffle que le personnel et les bénévoles de certains organismes communautaires devraient obligatoirement être vaccinés.

Ayant déjà exposé son opposition à l’application de la mesure dans les groupes communautaires, la Table des regroupements provinciaux d’organismes communautaires et bénévoles presse le gouvernement de revenir sur l’ensemble de sa décision.

Les préoccupations de la Table ne se limitant pas aux questions touchant le fonctionnement des groupes communautaires, elle s’intéresse aux conséquences des décisions gouvernementales sur la santé globale de la population. Cela implique de veiller au respect des droits fondamentaux et à l’accès aux soins dispensés par le réseau, tout comme aux alternatives offertes par le mouvement de l’action communautaire autonome.

La Ligue des droits et libertés a récemment soulevé que l’application du passeport vaccinal et de la vaccination obligatoire portaient atteinte, de manière démesurée, aux droits fondamentaux, alors que leur efficacité n’est pas suffisamment démontrée et que d’autres avenues sont possibles, notamment par l’accès rapide aux tests, le maintien du port de masque et de la distanciation. Elle demande d’ailleurs depuis plusieurs mois que le gouvernement lève l’état d’urgence sanitaire qui lui permet de gouverner par décret et revienne à un mode décisionnel démocratique, ce que la Table appuie d’ailleurs.

Comme bien d’autres, la Table a participé de différentes manières à faciliter l’accès au vaccin et à encourager la population à y recourir, mais elle estime que rendre la vaccination obligatoire est un tout autre débat. « La vaccination doit demeurer une décision individuelle libre et éclairée, et non se faire sous la menace de perte de salaire, de limitation aux services publics, de réduction d’accès au soutien et aux activités des groupes communautaires ou sous la menace de subir le jugement populaire», de dire Gaëlle Fedida, présidente de la Table. « Rappelons que la vaccination obligatoire, tout comme le passeport vaccinal, obligerait de plus des personnes souvent déjà marginalisées à dévoiler des conditions de santé ou des situations de vie les empêchant de se conformer aux mesures, par exemple des personnes en situation d’itinérance, ou toxicomanes ou au statut précaire. »

Tout en rappelant que le milieu communautaire a suivi, de bonne foi, toutes les consignes générales de la santé publique depuis le début de la pandémie, la Table estime que la vaccination obligatoire, et conséquemment l’imposition du passeport vaccinal, soulève des problèmes éthiques et antidémocratiques. « Imposer la vaccination d’ici au 15 octobre est irrespectueux des personnes et organisations qui auraient à s’y conformer, d’autant plus que l’ampleur de l’application n’est pas établie clairement et encore moins expliquée », poursuit Madame Fedida.

Le respect des droits de toutes et tous, le non-jugement et le libre choix étant des principes fondamentaux appliqués par les groupes communautaires, il serait inconcevable de les obliger à refuser à des personnes qui frappent à leurs portes l’accès à une activité ou à du soutien, d’autant plus que c’est parfois la dernière ressource sur laquelle ces personnes peuvent compter. « Quant au passeport vaccinal l’exiger des personnes qui fréquentent certaines activités des groupes est en soit problématique et équivaut à rendre la vaccination obligatoire, ce à quoi la Table s’oppose. Comment les groupes pourront-ils continuer de les accueillir et de les soutenir si en plus ils doivent se priver de personnel ou de bénévoles?» questionne Mercédez Roberge, coordonnatrice de la Table.

Bien que le gouvernement ait reconnu que le rôle essentiel des groupes communautaires les exemptait, partiellement, d’exiger le passeport vaccinal des personnes qui les fréquentent, il demeure que cette exigence équivaut à imposer la vaccination à de grandes portions de la population, ce à quoi la Table s’oppose. Contrairement à ce que l’on peut parfois entendre, il ne s’agit pas d’un caprice. Comment les groupes pourront-ils continuer de soutenir les personnes qui y recourent en se privant de personnel ou de bénévoles? À qui ouvriront-ils leurs portes s’ils ne peuvent plus accueillir leurs membres et les personnes participantes ? » questionne Mercédez Roberge, coordonnatrice de la Table.

En plus de refuser que l’État s’ingère dans l’autonomie des groupes en y imposant la vaccination obligatoire, les préoccupations de la Table et des regroupements provinciaux sont nombreuses et partagées, quels que soient leurs champs d’intervention.

Parmi les exemples nommons que l’obligation, pour les personnes proches aidantes, de présenter le passeport vaccinal pour entrer dans les établissements équivaudrait à les obliger à se faire vacciner. Malgré qu’elles assurent un soutien essentiel, l’accès des personnes aidantes aux lieux où se trouvent leurs proches serait grandement limité, ce qui nuirait évidemment à la santé physique et mentale de ces derniers, comme à celle des personnes aidantes.

Les personnes bénévoles, tout comme les organismes communautaires qu’elles soutiennent, seraient également grandement pénalisées par l’application de la vaccination obligatoire, alors que l’action bénévole est cruciale dans la construction d’une société plus égalitaire. Parmi les nombreuses formes de leurs participations à la santé de la population, soulignons que des bénévoles offrent de l’accompagnement-transport pour accéder à des services essentiels, de l’assistance dans les démarches juridiques en cas de violence sexuelle, de l’écoute, de l’aide alimentaire, etc. Alors que le gouvernement, depuis le début de la pandémie, compte sur l’action bénévole et l’encourage, il limiterait grandement la portée de son action en obligeant la vaccination de tout bénévole susceptible d’entrer en contact avec des personnes jugées vulnérables, sans que la définition ne soit précisée.

Alors que l’intention du gouvernement n’est pas encore officiellement adoptée ni diffusée, la Table a de plus appris que la définition de personnes vulnérables variait déjà selon les régions. « Des fonctionnaires transmettent des informations basées soit sur les balises du site web de Québec, alors que d’autres utilisent celles, très étendues, du gouvernement fédéral, mentionne Madame Roberge. À moins d’un mois du 15 octobre, cette confusion est inconcevable et illustre l’improvisation qui semble en cours. De plus, même si les premiers groupes à se sentir visés ont été ceux du domaine de la santé et des services sociaux, ce ne sont pas les seuls groupes communautaires à être en contact avec des personnes dites vulnérables, sans compter que selon cette logique, la mesure s’appliquerait aux commerces de détail, aux transports en commun, aux espaces publics, etc. Est-ce bien cela que le gouvernement souhaite?»

La Table rappelle que ni elle, ni ses regroupements provinciaux, pourtant directement touchés par la mesure annoncée, n’ont été consultés au préalable, et que le gouvernement ne les a toujours pas contactés pour entendre leurs opinions et préoccupations. Pendant ce temps, des dizaines de milliers de personnes qui travaillent ou qui y œuvrent bénévolement, tout comme la population qu’elles soutiennent, s’inquiètent et reçoivent des informations contradictoires. Le gouvernement doit revenir sur sa décision d’imposer la vaccination obligatoire, notamment chez les groupes communautaires.

 


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